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Avoir 20 ans dans les Aurès

Synopsis

Le 21 avril 1961, dans le massif des Aurès (Sud algérien), un commando de l’armée française formé d’appelés bretons affronte un groupe de l’Armée de libération nationale lors d’une embuscade. Les soldats parviennent à faire prisonnier deux fellaghas, dont une femme, et à trouver refuge dans une grotte.

Un soldat français blessé au cours de l’accrochage, instituteur dans le civil, se rappelle les événements qu’il a vécus avec ses camarades au cours des derniers mois. Leur opposition à la guerre en Algérie les a conduits dans un camp réservé aux insoumis.

Il se remémore la façon dont leur chef a su les transformer, de jeunes Bretons antimilitaristes qu’ils étaient, en redoutables chasseurs de ellaghas, prêts à tuer et y prenant goût. Tous se sont mis à piller, tuer et violer.

Une plongée dans les contradictions de la guerre d’Algérie autant que dans ficelles de l’âme humaine.

Thèmes : Guerre d’indépendance algérienne , Cycle Vautier

Réalisateur(s) : Vautier, René

Pays de production : France

Type : Long métrage

Genre : Docufiction

Année 1972

Durée : 97’

Scénario René Vautier

Image Pierre Clément

Son Antoine Bonfanti

Montage Nedjma Scialom

Musique Yves Branellec et Pierre Tisserand

Production U.P.C.B. - Unité de Production Cinématographique de Bretagne.

Distribution Cinéma Public Films.

Avec Philippe Léotard, Alexandre Arcady, Hamid Djellouli, Jacques Canselier, Jean-Michel Ribes, Alain Scoff, Jean-Jacques Moreau, Michel Elias.

Le commentaire de Marion Pasquier

Avoir vingt ans dans les Aurès, mourir dans les Aurès. Tel est le destin de Noël, membre d’un contingent d’appelés bretons insoumis et pacifistes que le lieutenant Perrin (Philippe Léotard) aura réussi à engager malgré eux dans l’horreur de la guerre. Noël était le seul à n’avoir jamais utilisé son arme, le seul à être allé au bout de ses convictions en libérant un prisonnier algérien promis à la "corvée de bois" et en désertant avec lui dans le désert des Aurès. Il mourra tragiquement et sa mort sera opportunément utilisée par son lieutenant pour appeler ses hommes à la vengeance contre les algériens. A une mort reçue, une mort rendue.

C’est en leur faisant assimiler ce principe que les dirigeants des appelés ont amené ces derniers à devenir des tueurs. "Au début on tire n’importe où parce qu’on a la trouille, après on vise parce que l’on y prend goût" raconte l’un d’eux. Par le biais du récit d’un soldat instituteur blessé, Avoir vingt ans dans les Aurès nous montre le mécanisme conduisant des insoumis à devenir des exécutants dociles. En exergue du film, René Vautierexplique par des cartons que sa fiction résulte d’une enquête menée sur des centaines de soldats, que tous les faits pourraient être confirmés par au moins 5 personnes. La fiction prend bien valeur de document.

Dans certaines séquences, on sent un basculement vers la chronique : lorsque les soldats racontent face caméra, ou lorsque cette dernière, en mouvement, prend le temps de décrire les êtres à l’écran, les appelés portés par l’énergie du groupe ou, dans un très beau moment, la famille d’algériens accueillant Noël dans leur tente et s’occupant de lui. Le récit, alors, fait une pause, pour nous permettre de contempler les personnages, de nous approcher d’eux.

Avec ce film, René Vautier pose un acte antimilitariste efficace. Via un récit scandé par des chansons disant l’ignominie du combat ("fous pas / ton pied dans cette merde / c’est une vraie histoire de fous"), il démontre le mécanisme effrayant par lequel tout pacifiste peut se transformer en machine à tuer, happé par la violence de la guerre.