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Combien tu m’aimes ?

Synopsis

Alger. Alors que ses parents viennent de se disputer, Adel, 8 ans, est confié à ses grands-parents. Khadidja lui fait partager son quotidien tandis que Lounès lui fait découvrir les animaux. Jour après jour, l’enfant et sa grand-mère s’accrochent inlassablement à la même question : combien tu m’aimes ?

Thèmes : Société maghrebine , Algérie

Réalisateur(s) : Zamoum, Fatma-Zohra

Pays de production : Maroc , Algérie

Type : Long métrage

Genre : Drame , Fiction

Titre original : Kedach ethabni

Année : 2011

Durée : 98’

Scénario : Fatma Zohra Zamoum

 Image : Rémi Mazet

 Montage : Karine Olivier

Son : Philippe Schillinger

Musique : Nourdine Alane

Décor : Adel Kacer

Production : Z et Compagnie productions,   FDATIC (Ministère Algérien de la culture), EPTV (TV algérienne), AARC (Agence Algérienne pour le Rayonnement Culturel), CCM (Centre du Cinéma Marocain), ONDA (Office National des Droits d’Auteurs)

Avec : Racim Zennadi, Nadjia Debahi-Laaraf, Abdelkader Tadjer, Noureddine Alane, Louisa Habbani

Bande Annonce (VOSTF)

Extrait d’un entretien réalisé par Beti Ellerson

La tradition et la modernité ne sont pas des périodes historiques séparées ou cloisonnées dans la vie des individus ou des sociétés extra occidentales (on peut le voir au Japon ou dans d’autres cultures). Dans chaque individu il y a des aspects progressistes et d’autres réactionnaires. Chacun fait sa propre synthèse de la tradition ou de la façon d’être moderne, c’est cette complexité qui m’intéresse chez les individus ou dans les dynamiques des sociétés. Le niveau critique que peuvent atteindre certaines sociétés pour discuter les impératifs de conformité (de la tradition) qu’ils se logent dans les pratiques sociales, religieuses, culturelles ou même de phénomène de mode.

J’ai voulu discuter cela dans le contexte d’une famille algéroise de classe moyenne sur trois générations de nos jours. Et il s’agit avant tout de sentiments, de partage et de transmission entre les individus d’une même famille.

La grand-mère demande à son petit-fils Adel : "Combien tu m’aimes ? D’où le titre du film...

Oui, le film porte le titre du propos même du film : l’amour en question. La question est assez rituelle dans la société algérienne entre les adultes et les enfants. Elle dit la force du lien mais aussi la nécessité de le construire. Le projet du film est de voir cet amour grandir entre l’enfant et sa grand-mère pendant la durée du film.

Au-delà de cette relation, il y en a d’autres où se déclinent les relations amoureuses : l’amour qui se termine entre les parents de l’enfant, l’amour qui nait entre des jeunes voisins, l’amour construit sur la durée entre les grand parents sur un mode raisonnable ou de devoir, etc.

Votre portrait de la grand-mère Khadidja et de la voisine Farida, c’est un regard féministe sur deux générations ?

Oui certainement, j’ai un grand intérêt pour les personnages féminins et pour la complexité de leur intériorité. J’admire vraiment, sans comprendre, l’extrême disponibilité de certaines femmes pour les membres de leur famille, comme l’est la grand-mère Khadidja, comme peut l’être ma mère et de nombreuses autres femmes de cette génération, autour des soixante-dix ans.

Quant à Farida, c’est une jeune fille d’une vingtaine d’années, ayant vécue la décennie noire en Algérie sans la comprendre, elle se débrouille donc avec les codes et contraintes qui sont nées de cette période (une nouvelle forme de religiosité ou d’exhibition de celle-ci). Elle se débrouille avec ses amours naissants et ses désirs de liberté mais elle apprend également des choses de Khadidja pour imaginer un futur (ellipsé dans le film).

La relation qu’il y a entre Khadidja et Farida tient d’abord à leur voisinage, elle se transforme avec l’arrivée de l’enfant Adel et les changements qu’apporte Khadidja a son mode de vie par amour pour l’enfant.


"Les adultes sont compliqués !" Cette expression de Khadidja, la grand-mère, résume le point de vue d’Adel, un jeune Algérien de huit ans, dont les parents se séparent et qui se retrouve confié à ses grands-parents. C’est avec ses yeux, à son rythme et à sa hauteur que le film aborde la question que pose sa grand-mère : "Combien tu m’aimes ?" Car c’est bien d’amour qu’il est question, de la capacité d’aimer et donc de vivre et désirer, face au patriarcat du grand-père qui craint pour la virilité d’Adel quand Khadidja lui apprend à cuisiner, face aux stratégies nécessaires à Toufik et Farida pour s’embrasser en cachette, face à l’incommunicabilité des parents qui ne peuvent plus s’asseoir pour discuter. Tout cela débouche sur une immense solitude devant des portes fermées, image finale d’un film sensible qui aligne les petites touches intimistes et tranquilles. Personne ne s’énerve et chacun souffre en silence, pour ne pas troubler le petit, pour ne pas faire de scandale. La caméra presque documentaire se passionne pour les gestes quotidiens afin de capter cet état d’entre-deux qui place Adel dans une nouvelle vie dont il perçoit peu à peu qu’il devra s’y résoudre - devenir adulte en somme, loin de l’innocence enfantine. (Olivier Barlet)