Année : 2012
Durée : 100’
Scénario : Mehdi Ben Attia
Directeur de la photo : Grégoire de Calignon
Ingénieur du son : Alan Savary
Monteuse : Emmanuelle Castro
Décorateur : Gilles Graziano
Auteur de la musique originale : Karol Beffa
Costumes : Marlène Gérard
Production : Mercredi Films, Motek Films
Avec : Mehdi Dehbi, Maria de Medeiros, Emmanuel Salinger...
Note d’intention du réalisateur
Le principal défi de l’écriture et de la réalisation de Je ne suis pas mort, c’est la double interprétation.
Il fallait que l’histoire tienne debout au premier et au second degrés, comme aventure et comme métaphore, comme film fantastique et comme film politique, comme récit d’une métamorphose et comme récit d’une folie, comme l’histoire d’un jeune homme qui déteste sa propre identité et comme celle d’un homme mûr projeté dans une nouvelle jeunesse, etc.
Pour raconter cette histoire complexe, j’ai opté pour un dispositif de mise en scène simple : empathie avec le personnage principal et respect de son point de vue. Car ce qui m’intéresse ici, ce n’est pas tellement le "fantastique", ce n’est même pas la méditation sur "l’identité", c’est le ressenti du personnage, son intériorité. Tout le travail avec Mehdi Dehbi, ainsi que le travail de la mise en scène et du découpage, a consisté à s’approcher de cette intériorité par définition invisible.
Mehdi Ben Attia
C’est ce vertige identitaire que Ben Attia traite sur le mode angoissant en tirant la ficelle du fantastique : multiplication des ellipses et des non-dits, des regards, des répliques mystérieuses, réduction de l’image à des détails ou des perspectives instables, lieux clos et noirceur, étrangeté des situations, etc. que ne renieraient pas un David Lynch, sans oublier la musique énigmatique de Karol Beffa qui avait déjà fait celle de Le Fil, premier long métrage du réalisateur sur un sujet sulfureux, une relation homosexuelle assumée en Tunisie. Ici aussi, et sur le même mode de la fascination corporelle, la femme de Richard, comédienne qui jouera un rôle narcissique au théâtre, se posera comme objet du désir de Yacine, au même titre que celui-ci voudrait flirter avec le pouvoir (un stage à l’Elysée). Par son regard et son retrait, elle s’installe elle-même dans l’étrangeté pour mieux incarner pour Yacine une position à conquérir.
En définitive, et sans livrer les rebonds et le dénouement de ce film captivant, Yacine pourra, comme Césaire et Fanon, mais aussi comme dans Le Fil, lancer : "Accommodez-vous de moi". Servi par une pléiade d’acteurs remarquables, par une caméra qui sait accompagner les corps et un montage serré qui donne le pouls à son récit, Je ne suis pas mort est une mordante réflexion sur le désir d’intégration.
(Extrait d’un article de Olivier Barlet)